Bouddah historique © « Musée royal de Mariemont »
Plus qu’un week-end pour découvrir, à Morlanwelz, dans l’écrin zen du « Domaine de Mariemont », au « Musée royal de Mariemont », une exposition à ne pas manquer – « Bouddha. L’Expérience du Sensible » -, nous présentant près d’une centaine de pièces, issues de ses propres collections, nous venant de Chine, d’Inde, du Japon, de Myanmar, du Népal & de Thaïlande.
« Le parti pris de ‘Bouddha. L’Expérience du Sensible’ a été de faire primer les œuvres sur le propos explicatif, de ne pas réduire la découverte de celles-ci à la lecture d’un cartel, mais d’encourager une approche sensible et une émotion esthétique. De donner la possibilité aux visiteurs de développer un lien particulier avec les œuvres » , écrit la commissaire, Lyce Jankowski, conservatrice de la « Collection des Arts extra-européens », au « Musée royal de Mariemont ».

« Avalokitesvara », Bodhisattva de la compassion (détail) © « Musée royal de Mariemont »
Dès notre entrée dans le grand hall du « Musée royal de Mariemont », nous sommes accueillis par une oeuvre remarquable, en bronze, une statue du bodhisattva « Avalokitesvara », figure bouddhique monumentale, dite « aux mille bras », considérée, à l’époque de sa commande par Raoul Warocqué, en 1910, comme ayant été fabriquée au Japon, qui, suite à une étude d’experts, est, désormais, identifiée comme étant une création chinoise remontant à la dynastie Ming (1368 à 1644).
Pas moins de 33 représentations d’ « Avalokitesvara » – l’un des Bodhisattvas les plus importants et vénérés dans le bouddhisme – sont présentées au sein de l’exposition. Les nombreux bras – dont il est, généralement, doté – symbolisent sa capacité à aider un nombre infini d’êtres. S’il possède plusieurs têtes, c’est pour symboliser sa capacité à comprendre les différents besoins des êtres. Tout « Avalokitesvara » joue un rôle d’intercesseur et de protecteur.
Tout Bodhisattva est un être de compassion, qui choisit de rester actif dans ce monde pour aider les êtres sensibles à s’éveiller. Il ou elle a atteint un niveau avancé de réalisation spirituelle, étant capable d’atteindre l’ « Eveil », mais choisissant de différer cette libération complète pour aider ses contemporains à se libérer de la souffrance inhérente à la condition humaine.
Si le Bouddha assis, sur un lotus, est bien connu, on en découvre de multiples versions – couronné, ascète décharné ou enfant joufflu – créées en albâtre, bois, bronze, céramique, cuivre, ivoire, lapis lazuli, schiste, … Parcourant cette exposition, voyageant du XIVè au XXè siècle, à la vue de représentions des plus humbles aux plus travaillées, nous découvrons quelques postures codifiées, comme le bouddha debout, marchant, couché (rendu célèbre par le fameux « Wat Pho » ou « Temple du Bouddah couché », de 46 m de long et 15 m de haut, édifié en 1788, à Bangkok), …
Le Bouddha historique, Siddhartha Gautama, couramment surnommé Shakyamuni, avant de grandir en Inde, serait né dans le Village de Lumbini, dans la plaine du Teraï, au sud du Népal, en 623 avant notre ère, son enseignement étant à la base du bouddhisme, censé nous aider à atteindre l’ « Éveil », pour devenir, comme lui, un Bouddha, un « Éveillé », l’ « Éveil » passant notamment par la connaissance et l’acceptation des 4 vérités : celles de l’inévitabilité de la souffrance, de son origine, de la possibilité de la cessation et du chemin à entreprendre pour y parvenir.
Soulignons que le bouddhisme possède différents courants, les principaux étant le « Theravada », dont le berceau serait le Sri Lanka, également répandu au Cambodge, au Laos, au Myanmar et en Thaïlande ; le « Mahayana » ou du « grand véhicule », apparut dans le Nord de l’Inde, s’étant développé en Chine, en Corée, au Japon et au Vietnam ; et le « Vajrayana » ou « bouddhisme tantrique », né en Inde, avant de gagner le Bhoutan, la Mongolie, le Népal & le Tibet.

Moulin à prières tibétain (XIXè s.) © « Musée royal de Mariemont »
Le « bouddhisme theravada » met l’accent sur les enseignements originaux du Bouddha historique, valorisant la libération et la quête individuelle de l’Éveil, l’objectif étant de devenir un arhat : quelqu’un qui est libéré, en suivant les enseignements du Bouddha.
Le « bouddhisme mahayana » voit plutôt l’ « Éveil » comme un chemin collectif. Il met l’accent sur la compassion et l’idéal du bodhisattva, celui qui fait le vœu d’aider tous les êtres sensibles à se libérer de la souffrance.
Le « bouddhisme vajrayana » dérive du précédent, mettant, cependant, particulièrement l’accent sur les rituels.
© « Musée royal de Mariemont »
Si le bouddha historique, Siddhartha Gautama, est vénéré dans des centaines de milliers de temples, de par le monde, voire à domicile, devant une petite « maison des esprits » familiale, un bouddha est un être qui a atteint l’ « Éveil », étant sorti du cycle des renaissances et ayant atteint la libération totale de la souffrance.
En vue de cette exposition, dès 2023, une série d’opérations de restaurations fut entreprise, sous le contrôle d’experts scientifiques, 23 pièces ayant ainsi été restaurées, dont une pièce en bois laqué : la statue du Bodhisattva Avalokiteshvara et son autel. De fait, après l’incendie du Château de Mariemont, en 1960, l’ensemble avait été démonté et mis en réserve. Si la statue avait déjà été restaurée, en 2006, ce n’était pas le cas de l’autel et de ses socles. Ces derniers présentaient des fissures, des traces d’oxydation, d’encrassement, des soulèvements et une perte de dorure. Certains éléments en bois, déformés par l’humidité, menaçaient également la stabilité de l’œuvre. Son état nécessita une campagne de restauration lourde, soutenue par le « Cercle royal des Amis de Mariemont ».
© « Musée royal de Mariemont »
Le fondateur des collections du « Musée royal de Mariemont », Raoul Warocqué (1870-1917), député, bourgmestre de Morlanwelz (1900-1917) y a largement contribué, faisant de la collection d’art bouddhique l’une des pierres angulaires de sa collection.
Par le biais de cette exposition, le « Musée royal de Mariemont » nous présente des pièces qui n’ont plus été vues depuis près de 85 ans. Mise en réserve après l’incendie du « Château de Mariemont », en 1960, cette collection dévoile aujourd’hui ses trésors méconnus, dont certains ont été spécialement restaurés pour l’occasion.
Ainsi, en vue de cette exposition, dès 2023, une série d’opérations de restaurations fut entreprise, sous le contrôle d’experts scientifiques, 23 pièces ayant ainsi été restaurées, dont une pièce en bois laqué : la statue du Bodhisattva Avalokiteshvara et son autel. Si la statue avait déjà été restaurée, en 2006, ce n’était pas le cas de l’autel et de ses socles. Ces derniers présentaient des fissures, des traces d’oxydation, d’encrassement, des soulèvements et une perte de dorure. Certains éléments en bois, déformés par l’humidité, menaçaient également la stabilité de l’œuvre. Son état nécessita une campagne de restauration lourde, soutenue par le « Cercle royal des Amis de Mariemont ».
Regroupés dans une alcôve intimiste, l’exposition nous offre également une rare opportunité d’admirer sept « thangkas » (peintures bouddhiques sur rouleaux), objets d’art sacré, dont chaque détail est symbolique, de la « Collection Léon Verbert », prêtés par les « Musées royaux Art & Histoire ».

Détail d’un des 7 « thangkas » © « Musées royaux Art & Histoire »
Une fois déroulés, ces objets liturgiques participent au rituel, appellant à la méditation. Ils peuvent également former un support d’enseignement et de visualisation. Expatrié belge ayant vécu en Chine, pendant 25 ans, Léon Verbert (1879-1941) a acquis plus de 600 pièces, dont 330 « thangkas », une partie de sa collection ayant été acquise,
en 1956, par les « Musées royaux Art & Histoire ».
Dans sa logique de médiation sensible, l’exposition nous propose, également, des témoignages intitulés « Dire le bouddhisme », cette installation sonore nous permettant de rencontrer pratiquants bouddhistes et chercheurs, chacun partageant son expérience, en apportant un éclairage sur des concepts qui caractérisent le bouddhisme, tels que le karma, l’offrande, la sagesse, la transmission par l’enseignement, …
© « Musée royal de Mariemont »
Au cœur de l’exposition, un court métrage d’animation, réalisé par la société parisienne « Opixido », présente l’histoire du Bouddha historique telle qu’elle est communément relatée.
A noter que, dans une démarche éco-responsable, la scénographie, particulièrement réussie, utilise du mobilier modulable et durable, les matériaux des structures, des parois et des vitrines des précédentes expositions étant réemployés. Quant aux nouveaux dispositifs scénographiques acquis, ils seront à leur tour introduits dans un circuit de recyclage, conserver, réutiliser, construire peu et limiter les usages uniques étant les maîtres mots qui accompagnent l’esprit de l’exposition « Bouddha. L’expérience du Sensible »..
** Avant d’accéder à l’exposition, avec l’aimable autorisation du « National Museum of Asian Art, Smithsonian Institution« (Washington D.C.), nous pouvons assister à la projection d’une installation vidéo immersive (accessible gratuitement) du réalisateur Stanley Staniski : « The Texture of Practice : Sri Lanka’s Great Stupa », nous invitant à vivre, en 15′, une journée de culte au pied du Stupa sri lankais « Ruwanwelisaya » (édifié en 140 avant notre ère/ 103 m de hauteur/renfermant des reliques corporelles du Bouddha historique), ce site dégageant une puissance émotionnelle hors du commun.
** Notons, au sein de l’expo, un parcours intitulé « Tout un Monde », qui s’adresse principalement aux familles, mais que chacun peut utiliser. Douze petites armoires permettent d’appréhender, par des interactions concrètes, l’univers du bouddhisme. Au programme : s’essayer à des exercices de concentration, revenir sur la vie du Bouddha, comprendre la symbolique du lotus, en réalisant un origami ou encore découvrir les quatre nobles vérités, avec la roue du « dharma ».
** Par ailleurs, le parcours photographique « Sarana », proposé essentiellement à l’extérieur (accessible gratuitement), nous offre un aperçu de la présence bouddhique en Belgique, une cinquantaine de clichés, réalisés par le photographe bruxellois Andy Simon, nous emmenant au « Centre Zen du Brabant Wallon », à Rixensart ; le « Dhammaramsi Meditation Center », à Rivière ; l’ « Institut tibétain Yeunten Ling », à Huy ; le « Karma Shedrup Gyaltso Ling », à Saint-Gilles ; le « Monastère Tilorien », à Houffalize, & le « Temple Yo e An », à Neerijse. Voici l’occasion de souligner qu’au XXIè siècle, sur un nombre de bouddhistes estimé entre 400 et 500 millions dans le monde, 130.000 sont répertoriés en Belgique.
Temple tibétain « Yeunten Ling » à Huy © Photo : Heymans/« L’Avenir »/2015
Pour nos lecteurs qui seraient intéressés dans connaître davantage sur le bouddhisme, nous leur recommandons de découvrir l’ « Institut tibétain Yeunten Ling », fondé en 1983, bénéficiant d’un temple, inauguré, en 2012, par le Dalaï Lama, sis dans le domaine du Château du Fond l’Évêque, sur les hauteurs de Huy. Prix d’entrée (incluant thé & biscuits) : 8€ (4€, de 10 à 16 ans / 0€, pour les moins de 10 ans). Contacts : 085/27.11.88 & yeunten.ling@tibinst.org.
** Enfin, entre culture et nature, le parcours « En pleine Conscience » nous invite à ralentir et à observer le monde qui nous entoure, dans un esprit de pleine présence, une carte géographique de ce parcours au sein du « Domaine de Mariemont » étant disponible à l’accueil.
** A souligner que, d’accès gratuit, le « Domaine de Mariemont », au croisement de la nature, de l’art et de la culture, classé « Patrimoine exceptionnel de Wallonie », un parc paysager à l’anglaise, d’une superficie de 45 hectares, abrite, au milieu d’arbres remarquables, aussi bien les ruines d’un palais du XVIIIè siècle, que des sculptures monumentales, telle un admirable Bouddah japonais, faisant face à l’entrée du musée, ou la célèbre oeuvre d’Auguste Rodin (1840-1917), récemment exposée à Mons, « Les Bourgeois de Calais » (1889/bronze).
** Un superbe catalogue (Ed. « Musée royal de Mariemont »/édition scientifique sous la responsabilité de Lara Bauden & Lyce Jankowski, en collaboration avec la professeure Ann Heirman, de l’ « Universiteit Gent »/ cartonné/ 285 p./30,5 × 24 cm/2024) nous est proposé, au sujet duquel les deux responsables écrivent, en 4è page de couverture : « Puisant dans la richesse des collections du ‘Musée royal de Mariemont’, cet ouvrage propose de découvrir les multiples représentations du Bouddha, sa légende et ses enseignements, la diversité des figures du panthéon bouddhique telles que le Bouddha de la médecine ou le Bodhisattva (être de compassion qui choisit de rester actif dans ce monde pour aider les êtres sensibles à s’éveiller/ndlr) de la compassion, Avalokitesvara, leurs attributs et leurs fonctions. Il invite également à revivre la rencontre de la Belgique avec le bouddhisme. Les objets réunis ici pour la première fois – et réévalués à l’occasion de la restauration d’un grand nombre d’entre eux – constituent le catalogue d’une exposition qui transcende les cultures, le temps et l’espace, pour nous inspirer, nous guider et provoquer notre sensibilité. »
** A souligner que, d’accès gratuit, le « Domaine de Mariemont », au croisement de la nature, de l’art et de la culture, classé « Patrimoine exceptionnel de Wallonie », un parc paysager à l’anglaise, d’une superficie de 45 hectares, abrite, au milieu d’arbres remarquables, aussi bien les ruines d’un palais du XVIIIè siècle, que des sculptures monumentales, telle l’admirable Bouddah Amitabha (XXè siècle/ bronze), en provenance du Japon, faisant face à l’entrée du musée, ou la célèbre oeuvre d’Auguste Rodin (1840-1917), récemment exposée à Mons, « Les Bourgeois de Calais » (1889/bronze).

Au croisement de l’art, de la culture & de la nature © « Domaine de Mariemont » © Photo : Olivier Raucroix
Ouverture : jusqu’au dimanche 11 juin, du mardi au dimanche, de 10h à 18h (dernières entrées à 17h15), du mardi 01 avril jusqu’au mardi 30 septembre (de 10h à 17h (dernières entrées à 16h15), du mercredi 01 octobre 2025 jusqu’au dimanche 29 mars 2026). Fermeture : tous les lundis (sauf lundis fériés), le jeudi 25 décembre 2025 & le jeudi 01 janvier 2026. Prix d’entrée : 8€ (6€50, pour les enseignants étrangers, les professionnels du secteurs associatif & du tourisme / 5€, dès 65 ans / 4€, pour les étudiants de 19 à 26 ans / 3€, pour les personnes en situation de handicap & les demandeurs d’emploi / 1€25, pour les « Art. 27 » / 0€, pour les moins de 18 ans, les enseignants belges, les détenteurs du museumPASSusées & le personnel de la Fédération Wallonie-Bruxelles). Catalogue : 35€. Contacts : 064/27.37.41 & accueil@musee-mariemont.be. Site web : www.musee-mariemont.be.
Prochaine exposition : du samedi 22 novembre 2025 jusqu’au dimanche 10 mai 2026 : « Marie de Hongrie. Art & Pouvoir à la Renaissance », qui nous plongera dans les origines de Mariemont pour s’étendre au cœur de l’Europe …
Yves Calbert.