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Dépister à temps le cancer du poumon afin de mieux le traiter

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Dépister à temps le cancer du poumon afin de mieux le traiter

Dans le cadre du mois de sensibilisation au cancer du poumon, l’Hôpital Universitaire de Bruxelles (H.U.B) lance un appel fort : il est temps de mettre en place un parcours officiel et accessible de dépistage du cancer du poumon en Belgique.

 

– Le cancer du poumon reste la première cause de mortalité par cancer en Belgique.

​- Des études internationales majeures ont démontré qu’un dépistage par scanner à faible dose réduit de 20 % à 30 % la mortalité liée au cancer du poumon chez les personnes à risque.

​- L’H.U.B peut mettre en œuvre un parcours officiel et accessible de dépistage, mais appelle à un cadre institutionnel et un remboursement clair pour le rendre possible.

 

Un cancer encore trop souvent diagnostiqué tardivement

Le cancer du poumon est la première cause de mortalité par cancer en Belgique :

9.487 nouveaux cas ont été diagnostiqués en 2023

5.716 décès ont été recensés en 2021

Le taux de survie à 5 ans est d’environ 30%

 

Souvent diagnostiqué à un stade avancé, il reste pourtant l’un des cancers pour lesquels les progrès médicaux sont les plus rapides : nouveaux traitements ciblés, immunothérapies et amélioration du suivi personnalisé permettent aujourd’hui d’allonger significativement l’espérance et la qualité de vie des patients. Mais, pour bénéficier de ces avancées, il faut diagnostiquer plus tôt.

« Nous disposons aujourd’hui des technologies et de l’expertise nécessaires pour identifier les personnes à risque et repérer la maladie à un stade précoce. Ce qui manque, c’est un parcours de dépistage structuré et reconnu par les autorités de santé. Il est urgent de franchir cette étape. » Pr. Dimitri Leduc, Chef du Service de Pneumologie de l’H.U.B

 

Des moyens existent, mais un cadre institutionnel manque

 

Des examens efficaces existent déjà — notamment le scanner thoracique à faible dose — et permettent de détecter les tumeurs avant l’apparition des symptômes. Cependant, ces examens ne s’intègrent pas encore pleinement dans le parcours de soins et ne sont pas proposés systématiquement aux publics à risque, comme les fumeurs ou les anciens fumeurs présentant une BPCO (Broncho-Pneumopathie Chronique Obstructive), souvent liée au cancer du poumon. La BPCO est, en effet, un facteur de risque à part entière : à tabagisme équivalent, les patients atteints de BPCO ont 2 à 6 fois plus de risque de cancer du poumon.

 

Or, selon un rapport du KCE datant d’avril 2024, le coût moyen de prise en charge d’un cancer du poumon diagnostiqué tardivement est 2 à 3 fois supérieur à celui d’un cancer détecté précocement. Le dépistage par scanner à faible dose chez les personnes à haut risque présente un rapport coût-efficacité favorable, estimé à 18.000 – 22.000 € par années de vie gagnées (points QALY) par patient. En Belgique, un traitement ou un programme est généralement considéré comme « coût-efficace » si le coût par points QALY gagnés est inférieur à 35.000 €. Une mise en place nationale pourrait donc générer, à long terme, jusqu’à 25 % d’économies nettes sur les dépenses hospitalières liées à cette pathologie.

« L’absence d’un cadre officiel et d’un remboursement clair des procédures de dépistage constitue un frein majeur. Pourtant, le coût humain et économique d’un diagnostic tardif est considérable : des traitements plus lourds, une qualité de vie dégradée et une charge accrue pour le système de santé. » Dr. Blandine Jelli, Onco-Pneumologue à l’H.U.B

 

Innovation et recherche pour un dépistage accessible et efficace

De nombreuses études internationales rigoureuses ont aujourd’hui démontré l’intérêt réel d’un dépistage par scanner thoracique à faible dose (LDCT) pour les populations à risque. Par exemple :

– Le NLST (États-Unis) a montré une réduction d’environ 20 % de la mortalité par cancer du poumon chez les personnes dépistées, comparé à la radiographie pulmonaire.

– Le grand essai NELSON (Pays-Bas/Belgique) a, quant à lui, rapporté une réduction de 24 % de la mortalité liée au cancer pulmonaire pour les hommes (et encore plus élevée chez les femmes) après plusieurs années de suivi5.

– Une méta-analyse récente, regroupant huit à onze essais randomisés et près de 90.000 à 95.000 participants, montre une réduction moyenne de la mortalité spécifique du cancer pulmonaire de l’ordre de 17 à 21 % chez les personnes dépistées, selon les protocoles6.

 

Dans un autre registre, le projet Interreg « ALCOVE », qui est co-financé par l’Union Européenne, explore le potentiel d’un « nez électronique » capable de détecter des composés organiques volatils caractéristiques du cancer du poumon dans l’haleine des patients. Cette technologie, complémentaire aux examens d’imagerie, pourrait rendre le dépistage plus rapide, moins invasif et plus accessible7.

 

Conscientes de ces enjeux, les équipes des services de Pneumologie et d’Oncologie Thoracique de l’H.U.B sont en train de préparer le terrain dans l’attente de l’obtention d’un remboursement du dépistage du cancer du poumon. Elles soulignent également l’importance d’un soutien institutionnel global qui prenne en compte le financement du sevrage tabagique (consultations, accompagnement, thérapies de substitution) pour réduire durablement le risque, ainsi que le renforcement des plateformes de coordination existantes, afin de garantir une prise en charge fluide, intégrée et continue du patient à risque.

« Ces résultats, appuyés par les recommandations nationales, européennes et internationales, sont sans appel : un dépistage systématique et ciblé diminue l’incidence de cancer pulmonaire et la mortalité associée. Nous avons les données, les outils et les compétences. Il ne manque plus qu’une décision politique pour franchir le pas. » Dr. Anouk Goudsmit, Oncologue à l’H.U.B.

 – Source : Hôpital Universitaire de Bruxelles (H.U.B.)