La Maison de l’histoire européenne présente sa première exposition photo et ce jusqu’au 11 janvier 2026. Intitulée Passé composé – un album européen, elle s’intéresse à notre besoin d’histoire et à nos interactions avec le passé, à travers plus d’une centaine de photographies. Bien loin de se cantonner aux musées ou aux livres, l’histoire joue un rôle important dans la vie de chacun et chacune : visites de lieux devenus touristiques, commémorations et reconstitutions d’évènements, fouilles, collections d’objets anciens…
Les interactions avec le passé peuvent prendre des formes multiples, et avoir des buts divers, comme renforcer des liens dans un groupe, construire son identité, se divertir ou encore se souvenir de certains drames. 27 projets photographiques, de 14 pays, dans 7 chapitres d’exposition : • Destination histoire : le tourisme contemporain a transformé le passé en quelque chose qui se visite. • Commémorer à l’ère post-héroïque : le mécontentement face aux cérémonies officielles du souvenir a conduit les Européennes et les Européens à organiser des commémorations populaires. • Rejouer l’histoire : les reconstitutions sont des reconstructions d’événements historiques, qui mettent l’accent sur l’authenticité dans les moindres détails. • Fabriquer des héros : la grandeur historique peut-elle perdurer ? • Dé-commémorer : pouvons-nous faire disparaître un passé indésirable en supprimant ses monuments? • Le passé comme paysage : tout n’est pas destiné à être commémoré et inscrit au patrimoine. L’oubli est naturel. • Historiennes et historiens du quotidien : plus le présent évolue vite, plus nous avons besoin de nous ancrer dans le passé. Six étudiantes, étudiants et récents alumni du département de photographie de l’École nationale supérieure des arts visuels de La Cambre ont été invités à créer un contrepoint aux thèmes et aux photographies sélectionnés par le musée.
Chaque section présente l’un de ces projets, développés sous la coordination des professeurs Hervé Charles et Olivier Thieffry. Le public est invité à laisser son empreinte dans l’exposition en sélectionnant, étiquetant et exposant des photographies anciennes, se mettant ainsi dans la peau d’un historien ou d’une historienne.
L’idée qui sous-tend cette exposition est à la fois simple et nuancée : il s’agit d’une exposition photographique sur l’engagement des Européen·nes vis-à-vis de leur passé et d’une interrogation sur les multiples façons dont nous invitons le passé dans le présent. L’idée est venue de notre communauté, avec des propositions d’accueil d’expositions photographiques.
Les projets photographiques suggérés étaient très intéressants et rendaient compte visuellement de la présence du passé dans la vie quotidienne ou les paysages, dans différents coins d’Europe. Pris individuellement, ils n’étaient pas suffisamment transnationaux pour un musée d’histoire européenne. Pourtant, rassemblés, ces projets photographiques laissaient entrevoir une conversation animée sur le passé qui se déroulait en dehors des murs du musée.
Les politiques publiques de l’Union européenne concernant le passé sont à un tournant, nécessitant une évaluation critique de l’impact et des résultats réels des deux dernières décennies de promotion d’une « culture européenne de la mémoire » par le biais de programmes ciblés. La résolution du Parlement européen du 17 janvier 2024 sur la conscience historique européenne souligne « la nécessité d’une évaluation honnête de la « politique du passé » de l’UE, par laquelle elle s’est efforcée d’ajouter de la légitimité au projet européen, de renforcer le sentiment d’appartenance à l’Europe et de favoriser la coexistence pacifique des peuples du continent, en reconnaissant de manière égale les réalisations et les lacunes existantes, et en examinant minutieusement les moyens par lesquels les citoyens ont été encouragés à s’engager dans le passé ».
Passé composé est la première exposition photographique collective de la Maison de l’histoire européenne. Construit en 1934 et inauguré en 1935, le bâtiment dans lequel se trouve la Maison de l’histoire européenne est intrinsèquement lié à la photographie : il s’agissait avant tout de l’institut dentaire caritatif G. Eastman. Georges Eastman (1854-1932) est un industriel et inventeur américain, cofondateur de la société de photographie Kodak. Il décide de léguer une partie de sa fortune à la construction d’instituts dentaires pour enfants défavorisés en Europe (Paris, Londres, Bruxelles, Rome et Stockholm) et aux États-Unis. Le bâtiment de Bruxelles a été conçu par l’architecte Michel Polak (1885-1948), qui a également signé, dans la capitale belge, le Résidence Palace et la Villa Empain. Eastman fut un pionnier de la photographie, il créa d’abord un nouveau procédé avec des plaques photographiques sèches puis introduisit le film en rouleau : ce que nous appelons aujourd’hui la « photographie moderne » était née.
Notre public est divers et nous avons des identités multiples, en tant que musée d’histoire, musée bruxellois et musée européen. Chacune de ces identités complémentaires a façonné notre exposition. En tant que musée d’histoire, nous souhaitons nous pencher sur les pratiques contemporaines des Européen·nes face au passé par le biais de la photographie. Partant du constat, certes banal, que la photographie est omniprésente dans nos vies et à portée de clic sur nos smartphones, nous voulons développer le sens critique du public autour d’un thème que la Maison connaît bien : le rapport au passé et à l’histoire. La plupart des projets photographiques ont été choisis pour leur dimension documentaire. Comme les chercheuses et chercheurs, les photographes documentaires passent du temps sur le terrain, parfois plusieurs années, rencontrant et interviewant leurs sujets tout en prenant des photos. Ils documentent, chroniquent, regardent de près. Ils sont des observateurs privilégiés de l’actualité, souvent assez discrets pour capter des images sans déranger les acteur·rices. C’est ce que les visiteur·euses verront dans les images de Passé composé.
« Passé composé – un album européen » du 28.03.2025 au 11.01.2026 à la Maison de l’histoire européenne, Rue Belliard 135, 1000 Bruxelles. Renseignements : https://historia.europa.eu/en